Septembre 2021 - La Lettre d’Amélie n°4 : PROVENCE

La musique de la région pour accompagner votre lecture :



Lundi 20 septembre 2021

Cher ami voyageur,

Il est des régions qui parlent au cœur plus que d'autres. La Provence est de ces territoires qui véhiculent la langue des cigales et des grandes vacances, du farniente et de la sieste sous un soleil trop chaud mais ô combien réparateur. Lorsque je traverse cette région en 2003, "sur cette côte méditerranéenne, je vais m’aventurer en ce printemps bien avancé. Sur une terre qui m’a vue grandir : la Côte d’Azur. Est-ce une culture familiale pétrie d’une insatiable curiosité qui m’a valu déjà de parcourir cette sinueuse route de bord de mer ?

Le long de la corniche, de Saint-Tropez à Menton, s’ouvrent à chaque virage de formidables panoramas sur la grande bleue. En vérité, je suis nostalgique de celles qui grimpent en à-pic au cœur des montagnes, ajoutant à la promesse d’azur au loin et d’éclats de soleil sur la peau, la joie de se retrouver loin de la foule.

La foule, celle que chante Édith Piaf, ne m’a jamais embarquée dans une farandole joyeuse, électrique, extatique. Synonyme de bruit, de dérangement dans mon silence intérieur, d’empiétement sur mon espace de liberté, elle m’a tôt fait prendre conscience des méfaits qu’engendrera rapidement la saturation touristique d’un territoire. (...)

J’aurais peut-être su apprécier, le soir venu, l’atmosphère enjouée des fêtes données dans ces villas qui participèrent grandement de la notoriété de cette côte… de bourgeois, d’aristocrates, d’artistes. Une atmosphère nocturne, mais toute de paillettes, où le champagne accompagnait l’extravagance… à l’heure mondaine de Gatsby le Magnifique."

Entreprendre un voyage en bulle de savon, c'est assurément se tenir loin de la foule. Il est en outre une approche musicale qui participe du voyage quantique, vous transportant presque d’un claquement de doigt dans l’énergie d’une région. 

En ce 3e lundi du mois de septembre, Olivia, pianiste intuitive, s'est encore une fois laissée prendre la main par Amélie pour voyager avec elle au pays des santons.

Vous fait-on une place au cœur de la bulle ? 


Photo : Eva Bigeard

La musique d’Amélie, propice au voyage, nous vous la partageons en outre avec émotion : http://www.voyageinterieur-enfrance.com/#musique

Le village de Graveson par le peintre Auguste Chabaud.

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EXTRAIT du voyage en Provence, au pays des santons

”Bientôt, un peu au nord de Saint-Rémy, au cœur du charmant village provençal de Graveson, niché au pied de la Montagnette, Amélie surprit en plein travail un homme en chemise à carreaux aux manches retroussées, en cette journée annonciatrice d’un été caniculaire.

— Il doit faire des dentiers, se dit tout haut Amélie, à la vue première de coquilles de plâtre.

— Non ! Pas des dentiers ! répondit Musette, qui, pour mettre la fillette sur la voie de la découverte, lui donna pour indices : 1) le père et le fils, 2) l’argile d’Aubagne et 3) Noël.

— Encore une activité qui a à voir avec Dieu, je parie, répondit Amélie.

— Tu brûles ! acquiesça la fée avec les mots de l’enfance.

À cet instant, l’homme sépara les deux coquilles de plâtre pour laisser apparaître une tête de femme couleur terre. Musette expliqua alors :

— Ce que tu vois là, c’est le premier morceau d’un santon. Modelé dans des moules en pièces détachées, le santon est fait d’argile en provenance des carrières d’Aubagne, le pays de Marcel Pagnol. Chaque morceau est ensuite séché, cuit au four pendant pas moins de douze heures puis assemblé sur fil de fer avant que le santonnier ne peigne, à la main, les traits du visage. C’est un artisanat qui perdure de père en fils et nous vient d’Italie. En 1223, les premiers santons étaient fabriqués dans les rues de Naples. Saint François d’Assise en parle alors au pape, qui donne ordre de reconstituer pour Noël la Sainte Famille en argile, en vue de conférer une âme aux églises en cette période et d’éviter que ne se greffe une fête païenne sur cette émouvante fête de Noël. Et pour cause, le santon vient du provençal « santoun » qui signifie « petit saint ».

Quelques siècles plus tard, le santon allait connaître une touche régionale et permettre de communiquer aux enfants le métier de leurs grands-parents. Comme on ne connaissait pas l’appareil photo, le santon venait figer le savoir-faire de l’ancêtre. D’autant que la Révolution était passée par là. Les églises fermèrent et le santon trouva sa place sur la hotte de la cuisine, le dessus de la cheminée, la commode de la chambre à coucher. Il était devenu un objet de décoration aux couleurs de la Provence.

— Tu vois, ajouta Musette pour compléter l’exposé, ce tissu jaune soleil sur la droite de la table, cet autre couleur rubis, qui vont servir à habiller les santons… c’est ce qu’on appelle des indiennes, importées par la Compagnie des Indes à la fin du xvie siècle. La Provence s’approprie très vite leur fabrication, mais à Lyon, où il est de grande tradition de tisser la soie, on s’inquiète de cette soudaine concurrence, au point de finir par en obtenir l’interdiction du commerce sur le territoire français. Les fabriques émigrent alors en Avignon, territoire pontifical non soumis à l’autorité royale.

Après la création d’une série de visages de femmes, l’homme transporta tout son matériel dans son atelier. La bulle s’engagea par la porte laissée entrouverte et Amélie put découvrir sur une autre grande table des têtes d’Arlésiennes, des bustes de gardes champêtres, des cuisses de meuniers… Un chantier qui faisait penser au jeu des sept familles ! Sur des étagères, dans une partie de l’atelier faisant office de boutique, on pouvait par ailleurs observer la femme au blé, dont le bouquet de sept branches de blé est ô combien symbolique des sept péchés capitaux. À ses côtés, le tambourinaire qui, lui, ne porte rien, car il ne possède rien. Et encore d’autres personnages aux visages burinés par les années et un soleil trop chaud.

Après ce tour d’horizon des étagères, la bulle reprit le chemin du dehors, évitée de justesse par les griffes du chat de la maison, qui, dans le même temps, se glissa dans l’entrebâillement de la porte. Amélie en eut des sueurs froides, ne s’imaginant pas invincible sous prétexte qu’elle était accompagnée d’une fée. Et si le chat était d’ordinaire son animal domestique préféré, elle se sentit soudain bien vulnérable face aux pattes de velours dont les griffes sorties auraient pu enserrer tout son être réduit en miniature dans l’espace de la bulle.”

Carte4.jpg

À toutes les étoiles dans le Ciel.

Aux bulles de savon de notre enfance
et à toutes les prochaines en partance vers le Ciel.

Aux notes de musique qui s’égrènent aussi en direction du ciel,
comme celles d’Olivia qui accompagne, au-delà de mes rêves,
la musique des mots, la vibration des régions.

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"Heureux qui comme Ulysse"...

Et si ensemble, nous entreprenions un beau et courageux Voyage qui mène ultimement aux frontières du profondément humain et de l'ultimement divin ? 

Merveilleuse suite et fin de journée,
Laurence 

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